Page:Eugène Le Roy - Mademoiselle de la Ralphie, 1921.djvu/244

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

honte ! ». Plus elle y réfléchissait, plus elle se révoltait contre cette terrible fatalité qui la dominait. Elle était profondément mortifiée de n’être pas mairesse absolue de sa volonté et elle s’effrayait des conséquences possibles de ces irrésistibles impulsions de ses sens. L’abbé Sagnol n’était sans doute qu’un homme superbe, sans esprit et sans caractère ; néanmoins, il pouvait faire un amant acceptable et décent. Mais qu’adviendrait-il si dans la suite, elle s’amourachait d’un beau goujat, d’un de ces êtres vils qu’une femme ne peut avouer sans s’accuser d’ignobles appétits ? Et alors elle frémissait en se rappelant cette demoiselle de la société périgourdine dont la Martille lui avait conté l’histoire, qui après maintes passades, s’était acoquinée à un colosse de portefaix, ivrogne et voleur, qui la battait, et avec lequel elle était tombée au dernier degré du vice et de l’abjection.

Valérie passa tout l’après-midi de ce jour enfermée, dans un pénible état de malaise physique et moral. Elle ressentait une sorte d’orgasme général, de plénitude fatigante et un vif mécontentement de soi qui l’assombrissait et la colérait. Elle était furieuse contre l’abbé Sagnol qui l’avait jetée en cette crise, et, s’il se fût représenté en ce moment, il eût été fort mal reçu, comme un chien dans un jeu de quilles, ainsi qu’on dit vulgairement.

C’est dans cette disposition d’esprit qu’elle dit à sa chambrière :

— Si cet imbécile d’abbé revient, tu lui diras que je ne suis pas visible !… Et puis, renvoie-lui son bréviaire par le facteur.

Mais le vicaire était bien loin de songer à revenir. Ce prêtre, d’esprit très ouvert à l’endroit des intérêts matériels, était, quant aux choses spirituelles,