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sortir du cercle étroit des vulgaires conversations provinciales ; aussi, était-il une société fort goûtée du défunt M. de La Ralphie. Les deux convives du moment avaient été ensemble au petit collège de Fontagnac, ce qui avait encore resserré leur amitié, et, depuis que la révolution de Juillet avait fait des loisirs à M. de La Ralphie, ils se voyaient souvent, chassant et pêchant ensemble, et allant librement les uns chez les autres.

M. Second et sa sœur, tous deux célibataires, habitaient à une demi-lieue de Guersac, le petit village du Prieuré, dans une vieille maison, demeure du prieur avant la Révolution. Les autres frères et sœurs s’étaient dispersés çà et là, au hasard d’un mariage ou d’un établissement. Ces deux êtres s’aimaient « comme frère et sœur », selon l’expression locale, et néanmoins passaient leur vice à se disputer au logis. Aussi n’y restaient-ils guère longtemps ensemble sans interruption, et faisaient-ils, chacun de son côté, de petites caravanes. M. Second prenait son fusil, sifflait ses chiens, et s’en allait chez des amis, restant deux jours chez l’un, huit jours chez l’autre suivant les circonstances, puis revenait au Prieuré, où sa sœur l’attendait avec impatience et l’accueillait tendrement avec tout plein d’attentions et de petits soins. Mais cela ne durait guère ; le surlendemain, quelquefois, à propos d’un coup de balai donné à Tanbelle, d’une poule dans le jardin, d’une contradiction insignifiante, les disputes comiques recommençaient. Parfois c’était Septima qui cédait la place : elle mettait le panneau sur sa bourrique et s’en allait chez des connaissances, à Guersac principalement, et y passait quelques jours. Pendant ce temps, M. Second faisait philosophiquement la soupe.

Le déjeuner des deux chasseurs tirait à sa fin, lors-