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Et, tirant le lièvre de son carnier, il le jeta sur la table :

— Si tu veux, ajouta-t-il, nous allons déjeuner sur le pouce et nous irons faire un tour après. Il est encore de bonne heure, nous pourrons trouver une matinée dans les fonds ; sinon, nous irons à la billebaude. »

M. Second ayant acquiescé, prit ses chiens par la peau du cou, à défaut de collier, et alla les enfermer au chenil où braillaient ceux de la maison. Puis il revint, se lava les mains à une vieille fontaine de cuivre rouge et passa dans la salle à manger avec. M. de La Ralphie.

Tout en expédiant un déjeuner sommaire de chasseurs, une omelette et un filet de porc froid, roulé et piqué d’ail, qu’ainsi préparé on appelle en Périgord un anchau, les deux amis devisaient.

— Que fait Septima ? demanda M. de La Ralphie ; elle devient rare comme toi.

— Tu la verras bien assez tôt répondit l’autre.

Septima était la plus jeune sœur de M. Second. Leur défunt père, un officier de santé du voisinage, — un chirurgien, comme on disait en ce temps, — passablement original, avait numéroté ses enfants en leur imposant un prénom indiquant leur ordre de primogéniture : Prima, Second, Tertia, Quatrième, Quintilia, Sextia, Septima, Octave. Il aurait continué ce numérotage indéfiniment, mais sa femme coupa court à cette manie en mourant peu après la naissance de son huitième enfant. Le voisinage, et surtout les soins donnés à ceux de Guersac, avaient créé une intimité assez étroite entre les enfants des deux familles. Le chirurgien, d’ailleurs, homme d’esprit, avait vu le monde à la suite des armées de l’empereur ; on pouvait causer avec lui de beaucoup de choses et