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— Il n’y a pas à aller contre !

Le malheureux régent, étourdi, s’esquiva, laissant là sa femme, et, après cette petite digression, on reparla de Valérie.

Épouserait-elle ? N’épouserait-elle pas ? La question fut derechef agitée et les avis furent très inégalement partagés. Toutes ces dames étaient pour la négative ; mais Mme Delfand pensait, au contraire, que Mlle de La Ralphie épouserait Damase : c’était, d’ailleurs, l’opinion de son mari, à qui ses fonctions judiciaires avaient donné une profonde connaissance du cœur humain…

— Il s’agit bien du cœur ! interrompit Mme Laugerie. Valérie, dit-elle familièrement, a du tempérament, voilà tout ; elle n’aime pas Damase, elle aime l’ « homme » ! Maintenant qu’ils sont séparés, qu’il lui tombe un beau garçon sous la main, elle le prendra, comme elle a fait de son ancien domestique !

Mme Delfand protesta bien, mais toutes ces dames furent du sentiment de Mme Laugerie, qui, il faut le reconnaître, approchait de la vérité.

L’assertion catégorique de la femme du capitaine confirma M. Anatole, qui écoutait dans un coin en regardant ses ongles, dans une idée que lui avait suggérée la bonne opinion qu’il avait de lui-même.

Puisqu’il avait échoué comme époux, pourquoi ne se revancherait-il pas comme amant ? Assurément, il valait bien, comme homme, ce soudard grossier, se disait-il en venant caresser complaisamment ses favoris jaunes devant une glace. Il n’était pas officier, c’est vrai, mais il était avocat, en passe d’être député, de devenir peut-être ministre, et d’avoir alors, non pas une simple croix de chevalier sur la poitrine, mais un ruban de commandeur autour du cou. Et puis un homme d’intelligence ne valait-il pas cent fois