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le voyage et le motif qui le causait, il eut comme une bouffée de cet orgueil naïf qui saisit les jeunes hommes à leur première paternité. Ah ! combien sa maîtresse lui était maintenant plus chère, combien elle était plus aimée, plus adorée, et combien il lui était reconnaissant, pour ainsi dire, de porter dans ses flancs élargis un enfant à lui ! Sa joie n’était pourtant pas sans mélange en songeant aux conséquences pour elle d’une indiscrétion toujours possible. Il avait aussi quelque inquiétude au sujet de ce petit être dont elle parlait à peine, bien loin de faire à son sujet les rêves dont se bercent les jeunes mères. Il sentait encore la fausseté de sa position à l’égard de Valérie. Dans une situation semblable, entre deux amants de même condition sociale ou à peu près, le devoir eût été tout tracé. Mais irait-il, lui, sous-officier sans nom et sans fortune, lui, l’enfant trouvé, l’ancien serviteur de la famille, offrir à Mlle  de La Ralphie de couvrir sa faute en l’épousant ? Il sentait l’impossibilité de ceci et en souffrait. Eût-il été officier même qu’il ne se fût jamais hasardé à le faire, car il en avait la certitude absolue, sa maîtresse, orgueilleuse et fière de son origine, était incapable de concevoir même la possibilité d’une pareille chose qu’elle eût taxée de pure extravagance. Cette chimère écartée, deux questions lui tenaient fortement au cœur : la réputation de Valérie et la destinée de l’enfant. Avec une infinie sollicitude, il exposait dans ses lettres qu’il fallait, à n’importe quel prix, éviter tout ce qui pourrait la compromettre.

L’enfant il le reconnaissait, il fallait le déclarer sous son nom, le confier, dans le pays, à une nourrice sûre ; il pourrait, lui, plus tard, le ramener à Fontagnac et l’avouer. Un enfant était une plume au chapeau d’un soldat, mais que serait-ce, si Mlle  de La