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les affaires ou le manque d’argent ne talonnent pas ; couchant dans les villes qui leur plaisaient, y séjournant, et, au bout d’une quinzaine de jours, ils arrivèrent à Toulon. Valérie était enchantée du voyage. M. de Lussac était un compagnon fort agréable ; il avait beaucoup couru le monde, jadis, et sa mémoire excellente lui fournissait une foule d’anecdotes et de faits locaux qu’il narrait avec agrément. Après avoir passé quelques jours à Toulon, ils furent s’installer à Hyères, dans une petite villa cachée au milieu des citronniers. Le commandeur passait pour le père de Valérie et on la croyait la femme d’un officier de l’armée d’Afrique.

Leur vie était calme, simple et telle qu’il convenait à une personne dans l’état où était Mlle  de La Ralphie. Elle était heureuse d’être plus près de Damase ; il lui semblait que la diminution de la distance la rapprochait du bonheur. Parfois, elle avait des envies folles de courir à Toulon, de prendre le bateau et d’aller le surprendre. Elle se représentait la joie de son amant en la voyant et se plaisait à jouir en imagination des plaisirs qu’elle regrettait, car elle était plus amante que mère. Dans ces moments d’agitation, M. de Lussac intervenait doucement et lui faisait entendre qu’elle ne pouvait pas, dans son état, risquer les fatigues d’une traversée ; que, d’ailleurs, le régiment de Damase était presque toujours en expédition, et, qu’enfin, fût-il à Oran, il serait souverainement inconvenant d’afficher ses amours avec un sous-officier. Certes, il ne doutait pas de la discrétion du jeune homme, mais ces choses-là ne se cachent pas longtemps.

— Vous ne voudriez pas, ma chère enfant devenir la fable de la garnison ?

Lorsque Damase apprit, par une lettre de Valérie,