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la plaine. Ces hauteurs s’étagent successivement et forment un massif de collines dont le faîte marque la ligne de partage des eaux de la Vézère et de la Dordogne. Çà et là, dans les meilleures parties, dans le voisinage d’une combe aux terres profondes, collé aux flancs d’un coteau ou assis sur une croupe plus fertile, un village, ombragé de noyers, montre la masse grisâtre de ses toits de pierre qui se confondent avec les murs des habitations. Sur un puy aride, aux pentes roides coupées par un chemin en lacet, un vieux repaire noble, aux murailles roussies par le soleil, se détache à peine de l’ensemble du paysage.

Sur la rive opposée au château, le long des prés, le chemin de halage suit la rivière où monte parfois une lourde gabare péniblement halée par une paire de bœufs. Les mariniers et les bouviers s’amusent en passant à faire parler l’écho fameux du rocher en mémoire d’un ancien monsieur de Guersac, fort avaricieux :

Moussu die Guersa
Ey plé lou sa ?

Et l’écho répond :

Plé lou sa !

Le paysage montueux des collines du Périgord noir a un aspect sévère, triste même parfois, avec des échappées sur de petits vallons où serpente un ruisselet né dans quelque « rosière », qui, après avoir fait tourner un minuscule moulin, vient apporter ses eaux à la Vézère qui coule lentement dans sa vallée verdoyante. De la terrasse du château, d’où l’on embrasse cet ensemble, on entend monter le bruissement de la rivière sur les galets des « maigres » et le ha ! ha ! lointain d’un laboureur poussant ses bœufs dans le sillon.