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lité ; de Christine de Suède faisant assassiner son amant Monaldeschi. Tout au plus, eût-elle accepté un mari effacé, une manière de prince-consort ; elle voulait dominer en amour comme en tout. Son attitude non équivoque détermina au bout d’un mois le vicomte à rester chez lui. Quant à Anatole Decoureau, il continua, n’ayant rien de mieux à faire, à parader sur le pont.

Lorsqu’elle fut installée à Guersac, Valérie eut la fantaisie de monter à cheval, et, sur sa prière, M. de Lussac, bon connaisseur en chevaux, en sa qualité d’ancien page des écuries de Madame, fut acheter, à Pompadour, une jolie bête de demi-sang qu’il dressa soigneusement. Mlle de La Ralphie profita vite des leçons du commandeur, et peu après on les vit ensemble, chevauchant par les chemins. Lui, monté sur la forte jument de feu M. de La Ralphie, la protégeait et la chaperonnait. Bientôt Valérie se complut à avoir près d’elle, attentif à prévenir ses désirs, toujours prêt à lui obéir, une sorte d’écuyer cavalcadour, rompu à ces façons galantes et légères du siècle dernier. D’une politesse raffinée avec les dames, le commandeur n’abordait jamais Valérie qu’avec une profonde inclination qui ressemblait à une révérence, et lui baisait la main en lui débitant un compliment qui sentait fort l’ancien régime et la littérature musquée des poètes de cour. Valérie trouvait cela charmant, et ces hommages galants, ces madrigaux précieux, toutes ces formes surannées l’amusaient. M. de Lussac avait été élevé par une de ses tantes, la chanoinesse de Bonnegarde, qui passait pour avoir été distinguée — avec tant d’autres — par Louis XV, et, disait-on, avait eu la gloire de fixer, pendant huit jours, le capricieux monarque. Aussi connaissait-il à merveille l’ancienne société,