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du soleil ; par M. Delfand, l’ancien procureur du roi, homme à l’aspect austère, auteur d’un opuscule moral, et que ses amis eux-mêmes n’auraient pas laissé seul avec une fillette de huit ans. Il y avait encore le capitaine Laugerie, qui, pour la circonstance, étalait sa croix d’ordonnance sur sa redingote boutonnée militairement ; et, enfin, M. Boyssier, en habit fripé, avec un jabot chiffonné, des escarpins et des lunettes d’or. Outre ces messieurs, le dais était encore escorté du maréchal des logis et des quatre gendarmes, en habit de grande tenue, les buffleteries jaunes croisées sur la poitrine, le chapeau en bataille maintenu par la jugulaire et le sabre au clair. Mais, ce qui caractérisait surtout cette procession, ce qui la rendait originale et unique, c’était, marchant entre les pénitents de réserve qui suivaient le dais sur deux files, le vieil archiprêtre en rochet et camail, la barrette en tête, monté sur son petit cheval poilu qui s’en allait bonassement, s’arrêtant avec le dais, repartant avec lui et s’ébrouant de temps en temps pour chasser la poussière qui lui montait dans les naseaux. Derrière le petit landais suivaient en masse le reste des hommes de la paroisse, paysans et citadins.

Après avoir parcouru les principales rues et places de la ville et s’être arrêtée aux reposoirs où Turnac donnait la bénédiction, la procession revint vers l’église. Lorsque Mlle  de La Ralphie passa de nouveau devant Damase, posté au coin du quai, le regard pénétrant qu’il lui adressa comme adieu lui fit surprise ; elle répondit à ce regard chargé de flamme par un battement de paupières qui pouvait passer pour un consentement.

Le lendemain, Damase était parti.