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amantes ou mères, puisent dans leur cœur comme en une source inépuisable, leur semble-t-il, mais que, néanmoins, le temps tarit et dessèche, à leur grand étonnement. Non, au cours de cet enlacement, aucune pensée voluptueuse ne lui venait.

Le chagrin avait achevé de tuer ses désirs ; elle voulait uniquement dire à celui qu’elle aimait un triste et dernier adieu. Cependant, s’il l’eût sollicitée des lèvres seulement, elle n’eût su ni voulu résister. Le danger de transformer en un rendez-vous vulgaire cette chaste entrevue était là, car Damase était jeune et ce n’était pas sans émotion qu’il sentait sous sa tête le sein soulevé de Mme Boyssier. Heureusement, il respectait l’abandon de la pauvre femme et ce dernier témoignage d’un amour épuré par la douleur.

Le temps s’écoulait en de longs silences, coupés par des chuchotements étouffés et marqués par les heures qui sonnaient lentement au clocher de l’église. La rivière bruissait dans les remous et froissait les herbes de la rive. Les insectes nocturnes susurraient doucement, comme pour calmer les angoisses de la séparation. Puis, dans les arbres, bientôt de légers bruits, comme des frémissements d’ailes, annoncèrent le prochain réveil des oiseaux. L’orient commençait à blanchir, faisant pâlir les étoiles, tandis que Vénus, radieuse, semblait une lampe brillante suspendue dans l’éther.

— Mon bien cher enfant, dit-elle en ôtant de son cou une médaille attachée par une petite chaîne d’or, voici une médaille miraculeuse qui te gardera de tout danger. C’est à elle que je dois d’avoir été sauvée, toute petite, de l’incendie de notre maison de la rue des Faures. Si mon affection pouvait lui ajouter quelque vertu, tu serais heureux !