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trument dont s’était servi Celui qui tient dans ses mains les peuples et les rois et sait donner à tous de terribles et d’édifiantes leçons.

Les curés des environs brodèrent de leur mieux sur ce thème, comme Turnac, et le répétèrent dans leurs conversations particulières, si bien que, de dévot en bigot et de bigot en cagot, au bout de quelques jours, la conversion de feu Latheulade, dit Caïus, passa pour miraculeuse parmi les bonnes femmes du pays, et les gens bien informés la racontaient avec force détails extraordinaires : ainsi se forment les légendes pieuses.

Il y eut pourtant une note discordante dans ce concert.

Lorsqu’on leva les scellés, le juge trouva un testament olographe par lequel le défunt Latheulade donnait tout son bien, mobilier et immobilier à Damase. En outre, ce testament, qui fut déposé chez le confrère de M. Boyssier, contenait une déclaration formelle d’irréligion. Le vieillard, quelques jours avant sa fin, déclarait mourir dans les sentiments d’incrédulité qu’il avait professés toute sa vie, et vouloir être enterré sans aucune marque de culte ou de religion quelconque. Il adjurait, en outre, Damase, comme il l’avait fait de vive voix, d’écarter de lui les prêtres, qui ne manqueraient pas de chercher à s’emparer de son cadavre.

L’ex-clerc pour laver la mémoire du vieux Caïus de la honte de l’apostasie in extremis qui lui avait été infligée par la fourberie de Turnac, montra à tous la grosse du testament qui lui avait été délivrée, et répandit un grand nombre de copies de la déclaration irréligieuse du défunt. Il y eut, à ce sujet, de grandes discussions à Fontagnac. Damase et quelques autres soutenaient que le vicaire avait joué une