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fois d’armoire et de siège, et quelques lourdes chaises, le long des murs, complétaient l’ameublement, tant bien que mal. Dans l’embrasure de la fenêtre sans rideaux, donnant sur le jardin du côté du vallon, la jeune fille travaillait au raccommodage des hardes paternelles.

M. Lefrancq fut frappé de la grâce et de la distinction de mademoiselle Desvars. Elle était grande, et son corps aux formes élégantes et chastes était comme moulé dans une pauvre petite robe noire, bien usée, qui tombait en plis droits, car elle ne portait pas de crinoline. Sa belle tête était chargée de cheveux d’un noir bleu qui encadraient d’épais bandeaux une figure au teint mat, un peu triste, où brillaient, comme deux étoiles, de beaux yeux d’un vert lumineux. Ces yeux d’une étrangeté sympathique, ombragés de longs cils noirs, avaient un charme indéfinissable et captivant ; et, tandis qu’il les admirait discrètement, des vers de Marot vinrent chanter dans la mémoire du jeune homme :

La duchesse de Nevers
Aux yeux verts,
Pour l’esprit qui est en elle,
Aura louange éternelle,
Par mes vers !

Mademoiselle Desvars ne paraissait pas contrariée d’avoir été surprise dans une occupation aussi prosaïque que le ravaudage de vieux vêtements, et ce