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ciproquement. Les traits, l’expression de la physionomie, l’arrangement de la résille qui enfermait les cheveux, l’envergure de la crinoline, tout était pareil chez les trois filles du notaire. On eût dit des épreuves photographiques tirées sur la même plaque, et on se prenait à déplorer la fécondité de l’artiste.

Ces demoiselles prièrent M. le receveur d’excuser leur père, retenu par un client : il allait venir dans un instant. Il n’y avait personne à l’étude, mais c’était la manie du notaire que de paraître extrêmement occupé. Quelquefois il allumait une lampe dans l’étude, la nuit, en sorte que les gens attardés et les voisins disaient : « Il brasse diablement des affaires, monsieur Bourdal ! »

Dans cette circonstance, le notaire faisait ses filles complices innocentes de son petit mensonge. Si elles avaient appris la vérité, elles s’en seraient confessées, certainement, car elles étaient extrêmement dévotes. Toutes trois étaient toujours bardées de scapulaires variés, appliqués sur leur échine en étrille et sur leur poitrine plate comme la main ; toujours surchargées de croix, de médailles, de bibelots pieux, qui leur pendaient autour du cou ; toujours munies de leur chapelet monté en argent, contenu dans un coco qui se dévissait.

Parmi les inconvénients du séjour d’Auberoque, celui qui affectait le plus les filles du notaire, c’était