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s’expliquait cet insuccès persistant en le voyant pratiquer. On eût dit plutôt un empirique, un mauvais maréchal-expert, qu’un vétérinaire diplômé. Aussi les méchantes langues disaient-elles qu’il ne l’était pas, ce qui était faux pourtant.

Tout cela ne l’empêchait pas d’ambitionner un emploi de préparateur à l’École vétérinaire de Toulouse. Madame Grosjac, qui lui avait soufflé la chose, ne manquait pas d’esprit ; mais son peu de jugement ne lui permettait pas de comprendre qu’il fallait, pour occuper une semblable situation, une science suffisante, de l’intelligence et une autre encolure que celle de son mari. Aussi le député de la circonscription, dont le « docteur », comme on l’appelait facétieusement, s’était fait l’agent électoral, était-il assassiné de demandes et de pétitions par ce couple impatient. Certes il les apostillait chaudement avant de les transmettre au ministre compétent ; mais il expliquait, d’autre part, au postulant la nécessité de conquérir une situation qui lui permit de forcer la main à Son Excellence : il y avait tant de demandes de ce genre !… « Ah ! si vous étiez maire d’Auberoque, conseiller d’arrondissement seulement, nous pourrions espérer d’enlever l’affaire !… » Malheureusement, M. Grosjac était conseiller municipal, pour tout potage, et encore n’avait-il été élu qu’à grand’peine.

Aux affres lancinantes de l’ambition mal apaisées