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le sifflement des locomotives et le grondement des trains… Mais, à propos de trains, voici celui de dix heures qui siffle au disque : si nous rebroussions chemin vers l’oustal ? il me semble que c’est l’heure de repaître ?

— Ma foi, je veux bien ; en bavardant, nous voici presque à la station. Mais auparavant, dites-moi ce que c’est que ce grand bâtiment couvert d’ardoises, là-bas à l’entrée de Charmiers ?

— C’est le temple protestant où le même pasteur, qui débuta dans un bouge, évangélise maintenant ses ouailles. Il lui a fallu, je vous assure, de la fermeté, même du courage, pour résister à toutes les misères qui lui ont été faites. Dans les commencements, les curés de la contrée et tous les gens bien pensants, nobles et bourgeois, l’avaient mis en quarantaine, comme un pestiféré… Des gredins incités et peut-être même stipendiés, sont allés jusqu’à assaillir sa maison la nuit, et l’unique boulanger de Charmiers, débiteur gêné de M. du Combroux, sur l’injonction de son créancier, refusait de lui vendre du pain. De même faisaient pour leurs fournitures le boucher et l’épicier, afin de ne pas perdre la pratique des messieurs de la commune. Malgré tout cela, malgré les persécutions sournoises ou brutales et les manifestations hostiles, ce brave pasteur a fondé une petite église qui prospère.

— Eh bien ! dit M. Lefrancq, c’est un de mes