soulevait parfois le pauvre garçon, et il ne se maîtrisait que par un énergique effort de volonté. Avec une infinie délicatesse il évitait les situations dangereuses, car il lui eût semblé déloyal de profiter de l’isolement de Michelette et d’abuser de la confiance qu’elle lui témoignait. Mais quelquefois, dans un affolement subit, il la serrait contre sa poitrine, lui couvrait la figure de baisers précipités, puis, sentant qu’il n’était plus maître de lui, il s’enfuyait et s’enfermait dans sa chambre. Le lendemain, fatigué par la fièvre et l’insomnie, il restait sombre, presque muet, et, de peur de céder à un emportement de passion, se montrait plus réservé avec la jeune fille.
Quelque ignorante et chaste qu’elle fût, la petite devinait tout cela instinctivement, et elle se désolait de voir malheureux celui qu’elle aimait. Sa foi en sa loyauté était absolue ; elle avait la certitude que, quoi qu’il arrivât, ils étaient l’un à l’autre pour la vie. Aucune préoccupation égoïste ne la hantait, et elle ne songeait même pas à ces éventualités qui soutiennent la vertu de tant de filles. Y eût-elle songé, d’ailleurs, qu’elle n’en eût pas été troublée, car le seul malheur qu’elle eût pu redouter, la cessation de son amour, elle le savait impossible, ayant confiance en lui « comme en Dieu », ainsi qu’elle le lui avait dit ingénument une fois. Elle connaissait assez sa noblesse de sentiments pour comprendre qu’il lui serait pénible de la posséder sans son aveu, par