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disant pour agrandir son jardin, au prix énorme de quatorze cents francs, resté inconnu jusque-là. C’était cher, mais, par une contre-lettre, la venderesse reconnaissait qu’il lui était dû deux cents francs seulement, et elle donnait du temps à l’acquéreur pour payer.

Lorsque les prétentions de madame Chaboin furent produites au conseil municipal, il y eut un vacarme de tous les diables. Les roués de village, qui avaient sacrifié les intérêts de la commune aux leurs, et les muets stupides, qui n’avaient pas fait une objection aux propositions insidieuses de M. Duffart parlant pour la châtelaine, braillaient maintenant comme des chiens clabauds. Guérapin, lui, jubilait en voyant le succès de sa ruse ; M. Jardelet, pensif, se demandait si ce n’était pas payer un peu cher l’avantage de voir les cochons passer devant sa maison pour aller au foirail, tandis que Coustau expliquait à son voisin qu’en de certains cas on était bien obligé de se laisser serrer la vis… Ainsi, lui, avait été obligé de subir les volontés de madame Chaboin, heureux qu’elle ne lui eût pas demandé dix francs du mètre !…

Puis chacun émit son avis, confusément et sans ordre. Les uns voulaient qu’on plaidât, d’autres qu’on transigeât, et quelques-uns prétendaient revenir sur la cession des communaux. M. Foussac disait qu’il fallait envoyer une députation à madame