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par la pensée, avec son large horizon et ses barques de pêcheurs prenant la mer, le petit port breton embelli par le souvenir des trois heureuses années qu’il y avait passées.

Et, en effet, quoique le pays d’alentour, entremêlé de cultures, de vignes, de rochers, de bois, de prés dans les combes, ne fût pas laid, le bourg lui-même avait un triste aspect. Vu de loin, avec ses maisons groupées au pied de l’antique forteresse, comme des poussins autour de la mère « clouque », il ne manquait pas d’un certain caractère pittoresque ; mais, de près, c’était autre chose. Sauf de rares exceptions qui rendaient le contraste plus choquant, les maisons, vieilles et baticolées, avaient un aspect sordide de bicoque et de cassine. Des appentis couverts de bardeaux déjetés ou de genêts sauvages, sous lesquels s’abritaient la nuit des oies et des canards, s’appuyaient contre elles, empiétant parfois sur la voie publique, sans aucun souci des règlements de voirie. Partout se montrait l’incurie des habitants, leur mépris de la propreté, leur insouciance en matière d’hygiène. Dans les petits recoins, les culs-de-sac servant de latrines, des immondices s’entassaient avec des débris de tuiles, des tessons de bouteilles et de pots. Dans les cours étroites, des pailles et des bruyères pourrissaient avec les détritus de ménage, sous les excréments. À côté des portes, à proximité des puits, des tas de