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demoiselle de Caveyre, car les deux femmes s’étaient promptement liées, comme il advient ordinairement entre personnes ayant les mêmes goûts. Une nuance pourtant les différenciait : pour mademoiselle Duffart, l’amour était une distraction ; pour mademoiselle de Caveyre, c’était un besoin.

Lorsque, sur les huit heures, laissant là-haut le cousin député, elle descendit avec son frère du château où madame Chaboin les avait invités à dîner, la sœur du conseiller était légèrement excitée par le champagne. Aussitôt après leur arrivée, ils furent entourés par un petit groupe de jeunes gens qui fréquentaient à Belarbre pendant les vacances : garçons zélés qui faisaient de la propagande pour M. Duffart et arrangeaient des parties de campagne pour distraire mademoiselle. Il y avait là Exupère, un cousin à lui, puis M. Pradelier, le commis de la culture des tabacs nouvellement installé à Auberoque, un neveu de M. Bourdal, tout frais émoulu du baccalauréat, et enfin John Monturel. Celui-ci tenait la corde, en ce moment : il n’était pas beau, ce n’était qu’un gringalet ridiculement habillé, mais il était drôle effronté, polisson, et il amusait mademoiselle Duffart.

Aussi prit-elle le bras qu’il lui offrit, et plantant là son frère, tous deux commencèrent à visiter les tourniquets, où elle ne put gagner qu’un pauvre paquet de biscuits. Puis ils entrèrent dans la baraque où le petit cheval savant faisait ses exercices.