Page:Eugène Le Roy - Les Gens d’Auberoque, 1907.djvu/25

Cette page a été validée par deux contributeurs.

des gens du premier. Tout au nord, au « rélus », selon l’expression locale, c’était des vergers, des « codercs » ou pâtis, des luzernes, et deux ou trois vieilles maisons lépreuses aux murs salpêtreux. Au milieu du champ de foire des chevaux, ombragé de vieux ormeaux, était l’antique fontaine de Sainte-Innocence, où l’on venait tremper, — « saucer » comme on dit à Auberoque, — les enfants chétifs et malingres.

Au loin, tout autour de la haute colline, des accidents de terrain irréguliers, tourmentés, s’étageaient progressivement jusqu’à de hauts coteaux hérissés de chênes verts au feuillage triste, qui fermaient l’horizon. Çà et là, sur un puy, ou à l’extrémité d’un promontoire brusquement terminé en falaise, de vieilles gentilhommières, d’anciens repaires nobles, faisaient comme une ceinture de postes avancés à l’imposante forteresse.

Le receveur revint vers l’hôtel par une ruelle étroite, taillée par endroits dans le roc vif, qui zigzaguait au flanc de la colline, et se terminait à un carrefour d’où l’on descendait sur la place par des escaliers à moitié ruinés et pleins d’herbes parasites, où les eaux cascadaient en temps d’orage. Cette ruelle, la place et les maisons semées le long du vieux chemin faisaient, avec quelques venelles et un cul-de-sac, toute la bourgade d’Auberoque.

« Quel trou ! » se dit le receveur, en revoyant