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une poule picorant dans un « retouble » ou éteule, pour un cochon vaguant dans un pâtis, ou bien un canard barbotant dans une mare de madame Chaboin. Et puis s’ensuivait la condamnation à l’amende, aux frais et dommages et intérêts prononcés au maximum par M. Caumont, pour apprendre aux bonnes gens à respecter la propriété d’autrui.

Même parmi ceux qui étaient indépendants, nul ne se souciait de se créer, de gaieté de cœur, des difficultés avec des gens méchants et armés de cette terrible puissance de l’or.

Quant aux notables, le juge, le percepteur, le notaire, l’huissier, le receveur de la régie, M. Grosjac, M. Capgier, M. Foussac, ils étaient à la dévotion de madame Chaboin et soutenaient ses candidats, que le curé Camirat prônait encore en chaire le dimanche.

Pourtant, parmi ceux qui avaient quelque influence à Auberoque, il y en avait un qui gardait à l’endroit du château une attitude réservée, presque hostile : c’était le frère Auxilien. D’un esprit un peu borné, mais fort honnête homme, le frère méprisait la nouvelle châtelaine, et ne cachait pas ses répugnances pour cette fortune scandaleusement acquise. À son insu peut-être, la reconnaissance avivait ses sentiments. Lorsqu’il comparait au loyal gentilhomme, à l’homme bon et généreux qu’avait été le défunt marquis d’Auberoque, cette femme cupide, à