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et, témoignage pénible de l’inconscience des électeurs d’Auberoque : celui-là, on l’achèterait.

À ces manèges individuels près des conseillers s’ajoutait, dans le même dessein, une manœuvre destinée à provoquer un mouvement d’opinion qui pèserait sur le conseil.

Après le rejet du projet d’aliénation des communaux, madame Chaboin, mise au courant de la situation par son intendant, avait compris qu’elle n’obtiendrait jamais ces communaux du conseil municipal tel qu’il était composé, les conseillers de la section de Charmiers, qui échappaient à son influence, y étant tous hostiles. Alors, sur son ordre, M. Guérapin avait remis en avant le projet de séparation.

En travaillant à cette séparation, l’intendant n’ignorait pas qu’il préparait la ruine d’Auberoque, mais c’était une âme servile qui eût vendu la commune et lui-même à madame Chaboin, pour se rendre indispensable et garder son emploi. Il avait encore, en agissant ainsi, l’espoir de satisfaire ses haines et ses rancunes, en évinçant le pharmacien du futur conseil, et en supplantant le maire, dont il était jaloux.

Cet homme n’était pas réellement intelligent, mais, en revanche, il était extrêmement rusé, de cette ruse sournoise et traîtresse du sauvage que n’a pas effleuré la civilisation. La ruse était tellement inhérente à sa nature, c’était chez lui un tel besoin de