Page:Eugène Le Roy - Les Gens d’Auberoque, 1907.djvu/173

Cette page a été validée par deux contributeurs.

mais, désireux de mener à bien cette négociation, il ne dit rien et s’en fut.

Le lendemain, il revint et dit au bonhomme qui « se riait » en lui-même :

— Eh bien, alors, l’affaire est faite.

— Quelle affaire ? dit l’autre, ayant l’air de tomber des nuages.

— Mais la vente de votre maison : madame Chaboin vous la paiera huit mille francs comptant.

— Oui, mais j’y ai pensé depuis hier : j’en veux seize mille francs !

M. Guérapin sursauta :

— Vous voulez rire ?

— Non, c’est tout de bon.

Lorsque madame Chaboin, déjà de fort mauvaise humeur d’être obligée de payer une maison trois fois sa valeur, connut les prétentions de Gardet, elle eut un violent accès de colère. Ah ! comme cette fille de paysans, comme cette parvenue orgueilleuse regretta de n’être plus au bon temps où le seigneur d’Auberoque eût pu faire jeter ce manant dans un cul de basse-fosse et s’emparer de sa maison ! Elle renvoya M. Guérapin avec une insulte obscène, puis s’enferma chez elle, rageuse, affolée.

Le lendemain, à son lever, elle aperçut de sa chambre le vieux forgeron qui la regardait d’un air narquois. Aussitôt elle ferma bruyamment la fenêtre et sonna M. Benoite :