C’était encore une des manies maladives de madame Chaboin que de ne vouloir être aperçue de personne lorsqu’elle était chez elle. Or, un jour qu’elle se promenait entre les plates-bandes de fleurs, elle avisa l’homme, qui, de sa fenêtre, la considérait fixement en prenant une prise. Le regard de Gardet n’avait rien de bien sympathique, il est vrai ; mais il n’en fallait pas tant à madame Chaboin, qui remonta au château et fit appeler son intendant.
Après avoir reçu les instructions de la châtelaine, M. Guérapin se fit un petit plan d’opérations, et, le lendemain, se transporta chez Gardet, qu’il trouva en train de forger une serpe. Après divers propos préliminaires et pas mal de circonlocutions préparatoires, M. Guérapin finit par aborder la question :
— Si quelqu’un voulait acheter votre maison, la vendriez-vous ?
— Non.
— Mais si on vous en donnait un bon prix ?
— Je vous dis que je ne veux pas la vendre.
— Pourtant, si on vous en offrait deux fois ce qu’elle vaut : quatre mille francs ?
— J’en demanderais huit.
— Vous n’êtes pas aisé, mon pauvre Gardet !
— Je suis comme ça, mon pauvre Guérapin !
L’intendant devint rouge en se voyant traité avec une familiarité qu’il croyait être permise à lui seul ;