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— Parfaitement ! dit l’autre, enchanté.

Très flattée d’être traitée en dame châtelaine et de voir la commune « à ses pieds », comme le dit impudemment l’agent d’affaires, madame Chaboin lui en sut gré et, le lendemain de cette démarche, le fit appeler.

Et voilà comment M. Guérapin fut promu à l’emploi d’intendant général de madame Chaboin. À la réserve du château, où M. Benoite restait le majordome, il avait la haute main sur tout le reste, était chargé de la régie de la terre, recevait, payait et ordonnait ; le tout en vertu d’une procuration en bonne forme dressée en l’étude de Me Bourdal. Le pauvre Goussard, passé en sous-ordre, ne fut plus qu’un garde au commandement de M. l’intendant général.

Dans les premiers temps, les ouvriers, les journaliers, les métayers, se réjouirent de la disgrâce de l’ancien régisseur ; mais ils ne tardèrent guère à s’apercevoir qu’ils avaient troqué un cheval borgne pour un aveugle : car si Goussard était exigeant et dur comme un paysan, M. Guérapin, lui, était impitoyable et féroce comme un commandeur de nègres.