Page:Eugène Le Roy - Les Gens d’Auberoque, 1907.djvu/120

Cette page a été validée par deux contributeurs.

probablement plus. Encore, s’il y avait un ascenseur !

— Un ascenseur ? répéta M. Benoite.

— Parfaitement. C’est un appareil mécanique qui vous élève, en un clin d’œil, aux étages supérieurs des maisons… On s’en sert en Amérique, mais on ne connaît pas ça en France, même à Paris : les Français sont si bêtes !

Le majordome sourit complaisamment à cette insolence, puis, entendant la cloche, dit :

— Si madame veut déjeuner ?

Madame Chaboin descendit à la salle à manger, et, comme M. Lagardelle, le voyageur de la « Pétrocorienne », chafrouilla les mets sur son assiette. Rien ne semblait bon à cette ancienne gardeuse d’oies, qui, dans sa jeunesse, avait vécu, au pays, de millas et de « frottes » à l’ail. Puis, ayant achevé ce semblant de déjeuner, la châtelaine se retira au fumoir et but deux verres d’eau-de-vie de Dantzig en fumaillant un cigare de la Havane qu’elle mâchotta pendant quelques minutes, puis jeta dans le foyer.

La déconvenue du premier jour avait un peu brisé l’élan des notables d’Auberoque : aussi ne se présentèrent-ils plus en troupe au château, mais un à un, deux à deux tout au plus, et à différents jours. Introduits près de madame Chaboin, ils voyaient une grande pendue, — les anciens souscripteurs de la « Mer nouvelle de Tombouctou » disaient pen-