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la République. Aux murs, un shako moins ancien, large du haut, avec un grand pompon jaune, un havresac poilu et des vieilles images attachées avec des clous à ferrer les souliers.

À côté de la table, étaient accrochées une peau de bouc et une sacoche à je ne sais combien de poches, brodée de fils de soie et couverte d’une peau de bête sauvage ; mon oncle avait apporté ça d’Afrique. Ailleurs, de grandes gourdes accrochées à des clous, contenaient des graines, et, du côté de la fenêtre, un épervier tôt fini pendait d’une poutre du plafond.

Parmi les images clouées au mur, il y en avait une au-dessus de la table que j’aimais plus que les autres. Cette image représentait la Liberté, patronne des Français. C’était une jeune fille de seize à dix-sept ans, coiffée d’un bonnet ramené par devant avec une petite floque ; elle avait une ceinture tricolore et un sabre pendu à un baudrier : qu’elle était jolie !

J’aimais cette chambre de passion étant enfant et jeune garçon, à cause de toutes ces choses, et surtout pour ces vieux livres où on trouvait des histoires si belles. Le haut du cabinet en était bondé. Dans le bas, partagé avec une étagère, il y avait, pêle-mêle, de vieilles ferrailles, des pierres à fusil, des cornes à mettre la poudre, d’anciennes fioles verdâtres, des grelots, des boutons de cuivre, des bouts de galons d’uniforme, un pistolet à pierre, un coudouflet à appeler les perdrix, des balles de calibre, des tabatières, des bésicles de corne, enfin tout ce bric-à-brac qui s’amasse dans les maisons où on ne jette rien. J’aimais à farfouiller dans toutes ces vieilleries, m’amusant avec. Je recherchais aussi les antiques histoires, les anciens almanachs. Oh ! les Quatre fils d’Aymon, que l’on voyait sur la couverture montés tous quatre sur le cheval Bayard, que de fois je l’ai relu ! Il y avait aussi un vieux Plutarque dont je ne pouvais me déprendre. Mon oncle y avait fait des