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cette position, que Fournier lui dit de ne pas se tourmenter, et qu’il verrait à arranger ça. Mais comme il était plus occupé de venir voir sa future femme, que de chercher des acquéreurs, le seul arrangement qu’il trouva, fut d’acheter lui-même à la demoiselle. Le marché fut fait pour cinq mille francs, dont deux mille deux cent cinquante qu’il devait payer d’abord au créancier ; deux mille cinq cents francs à la grande Mïette à la mort de la demoiselle ; deux cents francs pour les pauvres aussi à sa mort ; et encore cinquante francs pour la faire enterrer : C’est elle qui arrangea l’affaire ainsi. Et avec ça Fournier lui laissait la jouissance du tout, sa vie durant. Il ne faisait pas un bon marché, mon gendre futur, mais il était content en ce moment, et il voulait faire plaisir à Nancette qui aimait tant la demoiselle, que ça lui aurait fait quelque chose de se marier, la sachant dans l’embarras. Il réussit bien à ça, car lorsque tout fut arrangé, et qu’elle fut sûre que la pauvre demoiselle ne serait pas obligée de s’en aller, on voyait que la petite l’aimait encore davantage.

À la fin de mai, nous fîmes la noce : il fallut débarrasser le cuvier comme nous avions fait lors de mon mariage, et aussi inviter nos parents et amis. Mais il y en avait qui n’y étaient plus, et aussi il en avait de nouveaux : c’est ainsi que les familles, comme le monde, se renouvellent petit à petit, un à un, les uns s’en allant, les autres arrivant.

Mon oncle et ma tante Gaucher, d’Hautefort, étaient morts, mais mon cousin le maréchal vint avec sa femme et une drole de quinze ans. En passant, je dois dire que sa femme n’était pas cette jeune fille dont il m’avait parlé à Excideuil ; il avait eu encore deux ou trois bonnes amies avant de se marier. Martial Nogaret d’au-dessus de Brantôme était mort aussi tout jeune, mais sa veuve nous envoya son aîné qui était un fier drole. Le grand Nogaret, le tanneur