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à l’écurie, Hélie le convia de faire collation, ce qu’il voulut bien.

Quand nous fûmes là-haut, ma femme mit une touaille sur le bout de la table, tandis que Nancette allait quérir un fromage et des noix. Tout en cassant la croûte, il nous demanda des renseignements sur des ouvrages de terre, et comment il fallait faire telle ou telle chose, et le prix des ouvriers, et d’autres choses comme ça. Je lui dis tout ce qu’il me demanda sans le questionner ; mais comme Hélie était assez libre avec lui, eux ayant vu bien des misères ensemble, joint à ça que la jeunesse est curieuse, il lui demanda :

— Alors, tu fais valoir ton bien ?

— Oui, dit l’autre, me voici redevenu paysan comme mon père et mon grand-père.

Là-dessus, nous choquâmes les verres, et ensuite, au moulin.

Quand ce fut fini de moudre, et la farine sur sa jument, Fournier monta à la cuisine, donner le bonsoir à ma femme et à ma fille, et puis s’en fut chez lui.

Le soir à souper, nous causions de lui, et chacun dit son mot, cherchant à deviner le pourquoi de son retour au pays.

— Ma foi, dit Gustou, il n’a pas besoin de vendre ses paroles, son père lui a laissé assez d’écus pour vivre sans rien faire.

Peut-être un mois, six semaines après, voici revenir notre homme, encore avec un sac en travers sur sa jument.

— Alors ce n’était pas pour rire, dit Hélie, te voilà tout à fait campagnard ?

— Tout ce qu’il y a de plus campagnard.

— Tandis que nous faisions moudre, il se mit à pleuvoir assez dru, et comme c’était aux environs de midi, j’engageai Fournier à dîner, vu qu’il ne pouvait s’en aller avec ce mauvais temps.