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passant devant sa métairie de la Villoque, et qui n’avait pas été payé assez, pour le tort qu’on lui avait fait. Pour le quatrième nous ne savions : je me pensais en moi-même que ça pourrait bien être M. Malaroche, mais je n’en dis rien.

Le temps passait tout doucement, et les gens bonifaces attendaient en patience les grandes choses que devait faire l’Empereur, lorsqu’un jour, étant au marché d’Excideuil, j’entendis parler que nous allions avoir la guerre avec la Prusse. Pourquoi ? celui qui le disait n’en savait trop rien ; mais M. Vigier qui se trouva sur mon chemin me dit que c’était parce que le roi de Prusse voulait mettre un de ses parents pour roi en Espagne, et que ça ne plaisait pas à l’Empereur.

— Ma foi, que je lui dis, ce n’est pas la peine de faire la guerre pour ça. Les Espagnols ne sont pas gens à se laisser brider, ainsi tout tranquillement, par un roi étranger : il n’en aura pas pour six mois. Si les Prussiens veulent le soutenir, il leur faudra envoyer des armées, et il en restera plus de quatre ; c’est une guerre comme ça qui a perdu Napoléon. Au lieu de chercher à l’empêcher, on devrait pousser les Prussiens dans ce traquenard.

M. Vigier se rit un peu et me dit : C’est que vous n’entendez rien à la politique, mon pauvre Nogaret. Avec tout ça, si nous avons la guerre, ça ne fera pas marcher les affaires : allons adieu, bonjour chez vous.

Tout le monde sait comment la guerre commença, par cette prétendue bataille où le petit Badinguet ramassait des balles prussiennes ; on l’affichait partout, et les partisans de l’Empire se carraient de cette affaire, et disaient que nous serions bientôt à Berlin. Tout le monde aussi sait comment elle continua. Les journaux du gouvernement avaient beau mentir et tâcher de cacher la vérité, on la savait tout de