Page:Eugène Le Roy - Le Moulin du Frau.djvu/348

Cette page a été validée par deux contributeurs.

dans toute la classe, qui fussent au-dessus d’eux pour les bons sentiments ; aussi étaient-ils prêchés comme pas beaucoup d’enfants le sont. C’était d’abord leur mère, qui, dès qu’ils commençaient à comprendre, leur enseignait à être honnêtes avec tout le monde, surtout avec les vieux, et bons pour les malheureux. Jamais elle n’aurait souffert ce qu’on voit dans des maisons, où, pour amuser un petit drole, on lui donne un pauvre oiseau, qu’il plume et fait souffrir jusqu’à la mort.

Ces amusements, c’est de la mauvaise graine de méchanceté, ou de dureté au moins, qu’on sème en eux. Si nos enfants voulaient, comme tous les droles, attraper un petit poulet, leur mère le prenait elle-même, le leur faisait un peu manier, caresser, puis embrasser, et leur apprenait à le lâcher d’eux-mêmes, pour aller retrouver la mère clouque. Quand il venait des pauvres à la maison, c’est toujours un des enfants qui allait lui porter un croustet de pain, et en tout elle leur enseignait à être bons et secourables aux misérables.

Et puis, elle leur apprenait comme c’était mal de mentir, et honteux : le menteur est pire que le voleur ! leur répétait-elle toujours. Et elle leur faisait comprendre aussi, qu’il ne faut pas même être trop adroit, parce qu’alors on en arrive à tromper les autres, et qu’il faut aller tout droit son chemin où l’on veut aller, et non pas marcher comme les serpents.

Mon oncle et moi aussi, de notre côté, nous tâchions de les affermir contre les contrariétés, de les endurcir contre le mal, afin de les préparer à savoir souffrir plus tard. Nous nous efforcions de leur donner de bons sentiments, de leur inspirer des idées de dévouement au pays et à toutes les grandes choses. S’il n’y avait eu que nous, nous n’aurions pas été capables de dire ce qu’il fallait pour ça, mais nous nous aidions des livres dont j’ai déjà parlé. L’hiver,