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pas une manière bien honnête de faire la guerre ; mais tout ça est loin maintenant, et s’il en existe, ce que je ne sais pas, les arrière-petits-fils des cavaliers masqués qui attaquèrent la voiture, tuèrent le postillon, un gendarme et volèrent les fonds, sont, sans doute, d’honnêtes gens qui ne feraient rien de pareil.

Tout ce pays, en plein Périgord noir, semble fait exprès pour les vols de grand chemin, et les assassinats de nuit. On marche, quelquefois une demi-heure, une heure, sans trouver une maison, et quand on est au fond de ces combes, entre les bois, on pourrait crier au secours, que personne ne vous entendrait.

Mais après que l’on a passé Sarlat, à mesure qu’on approche de la Dordogne, le pays s’arrange, et quand on arrive à Vitrac et qu’on voit cette large plaine, avec sa rivière bleue, et les hautes collines et les rochers qui la bordent, on ne peut s’empêcher de dire que c’est plus beau que chez nous. Les fonds ne valent peut-être pas mieux que dans la rivière de l’Isle, mais c’est plus grand et ça impose plus. Je pensais aller passer le pont à Domme-Vieille, et monter ensuite jusqu’à Domme ; mais à Vitrac, je fus attrapé par un homme qui me dit qu’il allait à Domme aussi, et que c’était plus court de passer l’eau au bac de Vitrac, sans compter que ça ne coûtait pas aussi cher que le péage du pont. C’était un courtier qui allait pour acheter des vins, et qui avait ce voyage d’habitude. Nous entrâmes en ville par la porte des Tours, et il me mena à son auberge, qui était tout contre la porte Del-Bosc, par où on arrive de Domme-Vieille ; il était déjà nuit quand nous y fûmes. Comme j’étais assez fatigué, ayant soupé, je m’en fus au lit après avoir soigné ma jument.

Le lendemain, je me levai de bonne heure, et je montai dans le haut de la ville, sur la promenade qu’ils appellent : la Barre. Le soleil rayait déjà, aussi je fus bien étonné en arrivant là-haut, de voir toute