Page:Eugène Le Roy - Le Moulin du Frau.djvu/329

Cette page a été validée par deux contributeurs.

un peu embarrassantes, mais il trouvait moyen de s’en tirer à peu près. Et puis ensuite, c’était des devinettes à n’en plus finir, connues de tout temps dans nos pays, mais ça amuse toujours les jeunes droles.

Notre chambrière la Suzette aimait bien les petits aussi, mais elle aimait encore mieux un garçon du côté de Corgnac, qui venait la voir souvent le dimanche, et avec lequel elle se maria au carnaval de cette année 1860. Notre parent du moulin du Coucu ayant su ça, nous fit dire si nous voulions prendre sa drole l’aînée pour la remplacer, à seule fin de s’eysiner un peu, car il avait tant d’enfants qu’il avait peine à leur entretenir le pain. Lorsqu’il nous l’amena, il nous raconta qu’il avait trouvé un bon moulin du côté de Génis, mais qu’en vendant le sien, il lui manquerait bien encore quelque millier d’écus pour payer, et que ça empêchait le marché. Voyant qu’il avait bonne envie de travailler et de se tirer d’affaire, mon oncle se rendit caution pour lui, et il acheta ce moulin qui était sur l’Haut-Vézère et ne chômait jamais.

C’est cette même année, que je fus à Domme pour acheter une paire de meules dont nous avions besoin. Le premier jour, je m’en allai coucher chez le cousin Nogaret, au moulin du Bleufond, à toucher Montignac ; c’était une bonne étape, mais la jument ne craignait pas la fatigue. Le moulin est grand, c’est une ancienne papeterie où il y aurait pour faire une jolie minoterie. L’eau n’y manque jamais, elle naît au-dessus du moulin ; c’est un abîme comme celui du Toulon, près de Périgueux ; on n’a jamais pu trouver le fond.

Il y en a qui croient que cette eau vient de la Dordogne, par des conduits souterrains : moi je le croirais assez, car l’eau qui sort de là est bleue comme le dit le nom de l’abîme, et claire et pareille à celle de la Dordogne ; tellement que lorsqu’elle tombe à