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Et mon Fayolle reprit :

Vif comme il n’y a personne,
Bon homme tout de même,
Pour arranger quelqu’un
Il ne tire pas en arrière !

C’était bien la vérité, aussi tout le monde applaudit longtemps et quelques-uns qui connaissaient M. Masfrangeas vinrent lui toucher de main ; et lui riait de bon cœur avec tout le monde. Aujourd’hui, ça ne se ferait plus, les messieurs de la Préfecture ne s’y prêteraient pas. Je ne veux pas dire pour ça qu’ils soient fiers, mais ce n’est plus le genre. En ce temps on était plus proche de la Révolution ; la bourgeoisie sortie du peuple tout fraîchement, ne s’était pas encore élevée au-dessus de lui, et M. Masfrangeas n’oubliait pas que son père était un simple ouvrier tanneur d’Excideuil.

Au sortir du café, nous montâmes jusqu’au Pouradier, histoire de prendre l’air. Il y avait foule sur les boulevards, et en redescendant, étant en face du palais de justice fini depuis cinq ou six ans, M. Masfrangeas proposa d’entrer sur le Bassin, où il y avait beaucoup de marchands et de baraques.

Mon oncle acheta trois ou quatre bagues de la Saint-Mémoire en perles de couleur variées, et puis nous voici allant, vaguant de çà de là dans la foule, comme des badauds, regardant les marchands et les baraques.

Tout d’un coup, M. Masfrangeas s’arrêta devant la loge d’une géante. Une géante de quinze ans, appelée Caroline, disait un grand tableau où était tiré son portrait en grande toilette de soirée, avec force chaînes, carcans et le reste.

— Il faut voir cela, dit mon futur chef.

Mon oncle lui envoya, en se penchant un peu,