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taient les voitures de poste ; mais, pour une fois, ça n’est pas coutume.

Le fait est, que c’était un des hôtels les mieux tenus qu’on pût voir dans tout le pays. En entrant dans la grande cuisine, toujours encombrée dans un coin, de paquets et de malles, car c’était aussi là le bureau de la diligence et le relai, on voyait bien, qu’il y avait à la tête de la maison une maîtresse femme. Tout était propre, bien en place ; les chandeliers de cuivre brillaient, par rang de taille sur la cheminée, comme de l’or. Les casseroles et la batterie de cuisine accrochaient les rayons de soleil, et, sur la table massive, les couteaux étaient alignés par ordre de grandeur. Tout était net, luisant et arrangé avec goût. Et les servantes donc, en tablier blanc et le foulard sur les cheveux, propres comme des sous neufs, il fallait les voir aller et venir lestement, portant des plats et des bouteilles.

On nous mit à déjeuner dans une petite salle donnant sur la route, tapissée de papier vert à fleurs, avec des rideaux de coton blanc à franges aux fenêtres. Sur la cheminée, il y avait une ancienne pendule à colonnes sous un globe, et par côté, des bouquets de fleurs en papier, aussi sous verre. Au mur, étaient accrochées des images, représentant l’histoire de Geneviève de Brabant. La table était couverte d’une touaille, blanche comme des fleurs ; les verres brillaient, et les fourchettes et les cuillers semblaient d’argent : c’était un plaisir de s’asseoir là autour. Ah ! le petit Girou était content, et nous aussi, de lui faire cette honnêteté.

Et quelle cuisine ! on ne sait plus la faire comme ça maintenant. Tout dernièrement, nous étions à Périgueux et mon gendre a voulu que nous allions dans un grand hôtel. Oh ! la salle était bien assez belle, et le plancher ciré, mais que voulez-vous que je vous dise, ça n’était plus ça ; on nous a fait manger