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— Écoutez, lui dis-je, tout remué en la voyant comme ça, mon oncle viendra demain matin et il vous faudra aller chez M. Vigier lui donner une procuration pour toutes vos affaires ; il vous arrangera tout ça, n’ayez crainte. Sans ça vous seriez chicanée par des canailles qui vous mangeraient tout.

— Mais, dit-elle, ton oncle a ses affaires, et vraiment j’ai grand’peine de le charger de toutes mes misères.

— Quant à ses affaires, ce sont les miennes aussi, et je ferai pour nous deux ; ça ce n’est rien. Vous savez ce que je vous ai dit, lors de mon mariage : Si jamais vous avez besoin de quelqu’un, ne m’oubliez pas. Hé bien, maintenant me voici : mon oncle ou moi, c’est tout un ; mais il vaut mieux que ce soit lui qui voie tous ces gueux qui vous tracassent, il leur imposera davantage, et puis il a plus la connaissance des affaires. Allons, tranquillisez-vous, tout s’arrangera, et reposez bien cette nuit.

— J’en aurais bien besoin, dit-elle, car depuis la mort de mon père je ne dors plus.

Pour en finir avec les affaires de la demoiselle, je dirai tout de suite que mon oncle éclaircit bien des choses qu’on voulait embrouiller exprès ; qu’il réduisit plusieurs comptes qui étaient enflés plus que de raison ; qu’il rogna les ongles de Laguyonias et enfin fit entendre raison aux créanciers vrais, qui ne demandèrent pas mieux, dès lors, que de lui laisser liquider la succession.

Quand tout fut réglé, payé, il resta à la demoiselle le château avec les bâtiments de la cour, le puy au-dessous avec les truffières, un pré dans la combe, quelques terres autour du château, avec une vigne et un bois-châtaignier ; à peu près ce qu’on appelait autrefois : le vol du chapon.

Ce n’était rien comparé à l’ancien bien ; mais quand elle vit ça, elle qui avait eu peur de s’en aller de Puy-