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dans les fonds, où l’on entendait le bruit pressé des martinets, dont les hauts fourneaux dardaient en l’air des langues de feu qui se réflétaient sur l’étang, et dont les portes brillaient dans la nuit comme des gueules enflammées, sont désertes. Les roues qui faisaient marcher les marteaux et les soufflets sont arrêtées et pourries ; les tuilées effondrées laissent voir à l’intérieur les poutres noircies ; les murailles tombent, les levées des étangs sont ébréchées et les hauts fourneaux s’écroulent ; il n’y a plus que des ruines partout et la misère est dans le pays.

Tout ça c’est l’ouvrage du dernier empereur. Pour faire plaisir aux Anglais qui nous voudraient détruire, il a fait avec eux des arrangements qui ont ruiné bien des gens dans nos pays, et dans toute la France à ce qu’il paraît.

Ah ! c’est vrai que depuis lors nous payons le fer un peu meilleur marché. Mais d’abord, le nôtre valait mieux, et après ça qu’est-ce que ça faisait de le payer un peu plus cher, du moment que l’argent restait dans le pays et faisait vivre nos ouvriers, qui le dépensaient chez les marchands, les artisans, et achetaient des denrées aux paysans ?

Tout le monde y trouvait son compte, tandis qu’aujourd’hui notre argent s’en va dans la poche des ouvriers étrangers, au lieu de faire vivre les nôtres, qui sont minables.

À Saint-Paul, nous entrâmes à l’auberge, mon cousin et moi, et nous fîmes faire un bon tourin. Après ça un quartier d’oie passé à la poêle. Quand nous eûmes déjeuné, Aubin me montra le chemin et après lui avoir bien dit de ne pas manquer le jour de la noce, je le quittai.

Je fis le chemin assez lestement, et le soir après souper, j’allai voir Nancy pour lui dire que toutes les invitations étaient faites, et qu’il n’y avait plus à se dédire, quand même elle se repentirait d’avoir promis.