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mais franchement avec ses longs cheveux, sa barbe et sa peau de bique, il avait plutôt l’air de quelque sauvage que d’un homme du Périgord ; mais je crois qu’il était Limougeaud.

Une fois rendus à la cabane, mon cousin ralluma le feu et nous bûmes la goutte pour nous réchauffer, car la pointe du jour était proche et le froid du matin tombait sur nous.

L’Angelus sonna bientôt à Saint-Paul, puis à Jumilhac, et plus loin à Saint-Priest. Je vais te conduire jusqu’à Saint-Paul, me dit mon cousin, de là tu t’en iras à Grafanaud, c’est plus court.

En marchant, nous causions, et il me disait que ce pays de bois, de prés, de landes et d’étangs, qui me paraissait bien pauvre, ne l’était pas tant qu’il en avait l’air. Les bois donnaient beaucoup de revenu en feuillard, en charbon ; et toutes les forges du pays qui marchaient, faisaient vivre les gens. Outre celles de Grafanaud, de Fayolle et de Montardy que j’avais vues, il y avait encore à ce qu’il me dit, les forges du Gravier, du Tendeix, de Vialette, du Cros, des Fénières, du Moulin-Neuf, de la Barde, de la Meynardie, de Mavaleix. Toutes ces usines, et les hauts fourneaux toujours allumés, étaient une richesse pour le pays et donnaient du travail à une masse de gens : forgerons, mouleurs, ouvriers des hauts fourneaux, bûcherons, charbonniers, muletiers qui allaient chercher le minerai du côté d’Excideuil, d’Hautefort ; et tout ce monde donnait du débit aux cantines des forges, aux auberges, aux marchands ; aussi le pays était à l’aise.

Depuis, ça a bien changé. Toutes ces forges qui entretenaient le bien-être dans le pays, sont arrêtées ou presque toutes. Les hauts fourneaux sont éteints. Aux Fénières on fait encore quelque peu de moulage de fonte, des pots, des marmites, des chaudières, et c’est tout. Ailleurs tout est mort. Ces forges cachées