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sa serre, avec un serre-tête sur sa cer-velle, trouva un cerf-volant qui l’amusa, et un ser-pent qui l’effraya. Il appela un ser-gent qui fit le ser-ment de s’avan-cerr, et de pas-ser son coupe-choux au travers du reptile…

Quelquefois, lorsque ça durait un peu trop, le vieux M. Serr levait les épaules et disait tout haut, sans cesser son travail : tas de crétins !

Mais ce jour-là, ce fut moi qui servis d’amusement à ces messieurs. Le sous-chef étant sorti, M. Gignac s’écria tout à coup qu’il n’avait plus de guillemets et me dit : Jeune homme, allez donc à la 1re division, chercher la boîte à guillemets ; c’est là au bout du corridor, la porte à gauche. Je soupçonnais bien quelque farce, mais ne sachant trop, j’y allai. À la 1re division un monsieur très sérieux, avec une calotte grecque soutachée, me répondit gravement que la boîte était à la 2e division. J’allai à la 2e, où on me dit qu’elle était au greffe du Conseil de Préfecture qui venait de l’envoyer quérir. Je finis par comprendre, et je revins me mettre à mon travail.

— Hé bien, fit M. Gignac, et cette boîte ?

— Allez la chercher, répondis-je sans me déranger.

Derrière les pupitres, on entendait les rires étouffés des deux expéditionnaires.

Quelle différence avec le Frau ! Être enfermé dans cette sale boîte, comme disaient les jeunes gens, moi qui étais si libre là-bas ! Des fenêtres, on voyait les toits en tuiles creuses, des vieilles masures étagées sur les pentes de l’antique Puy-de-Saint-Front, pleins de tessons de pots et de bouteilles, de sales chiffons, de vieilles savates, et où errait parfois un chat maigre et hérissé. Ah ! ce n’était plus la vue du bief du moulin qu’on avait de la chambre de mon oncle. Et quelle odeur dans ce bureau ! C’était comme un relent de vieux papiers qui prenait à la gorge, mé-