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Jasse, et, avec une amicale petite tape sur la croupe, l’envoya vers son écurie ouverte. Près de la porte de la cuisine, une vieille ânesse grise baissait la tête, les oreilles pendantes. À côté d’elle se tenait une grande fillette d’une quinzaine d’années, aux cheveux noirs embroussaillés, nu-pieds, en brassière de serge brune rapiécée misérablement et en cotillon de droguet usé, trop court, tenu par des bretelles de lisière.

— Te voilà, Sylvia !

— Oui, maître : je suis venue porter de la mouture.

— Tu as joliment grandi depuis que je ne te vis, il y a deux ans !

La « drôlette » eut un léger sourire, et ses grands yeux noirs étincelèrent à travers les mèches emmêlées de ses cheveux.

— Veux-tu, maître, que j’aille accrocher la bride dans l’écurie ?

— Je veux bien : tiens, la voilà.

— Sylvia ! tu ne sauras donc jamais dire « vous » au monsieur ? fit la Grande, accourue sur le pas de la porte.

La petite la regarda d’un air étonné, puis se dirigea vers l’écurie. Comme elle traversait la cour, Jannic passait, allant toucher ses brebis. En voyant la fillette, il se planta, la regarda de ses yeux ingénus.

— Qu’as-tu donc à m’aviser ainsi, berger ?

Le garçon rougit, et, sans répondre, suivit ses ouailles.

— Dis-moi, Sylvia, demanda le jeune docteur quand elle fut revenue, qu’y a-t-il de nouveau, là-bas, au moulin ?

— Il y a bien prou d’affaires ! Des ailes cassées à la grande roue ; puis la pelle du coursier qui est