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un parent campagnard, mais, à la ville, cela ne siérait pas.

— Je remarque, Daniel, que, nonobstant vos idées un peu jacobines, vous êtes plein de bon sens ! déclara M. de Légé qui ne tenait pas à produire dans son monde ce parent pauvre et huguenot.

— Je vous remercie de la bonne opinion que vous avez de moi, mon cousin.

— Puisque nous devons nous séparer plus tôt que je ne croyais, reprit Daniel après une pause, laissez-moi vous adresser une petite requête. Parmi les quelques bijoux antiques recueillis par mon père est une petite bague qui figure un serpent enroulé. Je suis sûr qu’elle irait très bien à ma cousine : voulez-vous me permettre de la lui offrir ?

Et il tira l’objet de sa poche.

— Mais certainement ! répondit M. de Légé qui, au mot de requête, avait commencé son habituel hochement.

— La voici donc, ma cousine.

Ayant ôté son gant, mademoiselle Minna passa la bague à son doigt.

— Elle est fort jolie et va à merveille !… Je vous remercie, mon cousin ! dit-elle avec un doux clin d’yeux. Ces prunelles d’escarboucle me rappellent le regard furieux de ma vipère ! ajouta-t-elle d’un air d’intelligence.

— Mais, fit observer M. de Légé, vous vous privez peut-être d’un objet de valeur, Daniel ?

— Oh ! cette bague n’a pour moi d’autre valeur que celle que voudra lui donner ma cousine !

Le chemin qu’ils suivaient était herbu, gazonné, défoncé, raviné, par places ; bossu, inégal, avec des bourbiers dans les fonds, comblés au moyen de fagots,