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avait soignés avec un dévouement exemplaire n’eut l’idée de lui témoigner sa gratitude en manière quelconque.

En songeant à cela, Daniel souriait : « Si j’ai fait un peu de bien, se disait-il, ce n’est pas pour en être payé par de la reconnaissance… »

Il y eut pourtant une exception. Un jour, tandis que le docteur cueillait des épis de maïs, il vit venir à lui une fillette d’environ quinze ans, aux cheveux blond de lin, aux yeux bleu de faïence, sa cape de grosse bure sur la tête, car il bruinait. Il soupira, songeant à Noémi.

— Monsieur Daniel, dit la drôlette, en patois, lorsqu’elle l’eut joint, je vous apporte une paire de chausses. Ce n’est guère pour ce que vous méritez, mais je vous prie de la prendre tout de même.

Et, tirant les bas de sa poche, elle les tendit au docteur.

— Mais pourquoi me portes-tu ça !

— Parce que vous avez guéri mon père !

— Mieux vaut que tu les gardes pour lui, ma fille.

— Oh ! monsieur Daniel ! dit la petite, dont les yeux se mouillèrent ; j’ai filé la laine, j’ai fait les chausses moi-même : prenez-les, je vous en prie !

— Donne, mon enfant ! répondit le docteur, touché de cette gentille requête.

— Elles vous iront bien allez ! continua la visiteuse ; lorsque vous veniez chez nous, j’ai bien fait attention à la grandeur de votre pied.

Le docteur se pencha et baisa paternellement la fillette au front :

— Merci, ma petite ! répliqua-t-il, ému.

Et, pendant qu’elle s’en allait, son esprit que tou-