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— Mais, braves gens, j’étais à Laroche-Chalais lorsqu’il grêla, je viens présentement de Sainte-Aulaye, et je vous puis affirmer que les blés des huguenots ont été grêlés comme ceux des bons christians…

— Ôte-toi de là vieille bête ! tu ne vaux pas mieux qu’eux ! dirent plusieurs en le bousculant avec rudesse.

En chemin, toutefois, d’aucuns, y voyant un peu plus clair que les autres, se dérobèrent isolément, çà et là, dans un taillis, derrière une haie, traînèrent en arrière et prudemment revinrent chez eux. Ils étaient sept ou huit peut-être. Tout le reste continua, en braillant de basses injures à l’adresse du parpaillot. Bruyamment ces attroupés se remembraient entre eux leurs prétendus griefs contre lui. Le projet de suppression des étangs, chose étrange, irritait ces paysans dont la plupart ne possédaient pas un pouce de terre. Il y avait pourtant là quelques rares propriétaires, comme ce mauvais Fréjou qui véhémentement se plaignait d’avoir été exploité par ce sorcier de médecin higounaou. Dans cette cohue, il y avait aussi nombre de gens soignés gratuitement par le docteur, et, auxquels il avait fourni des remèdes : nul ne s’en souvenait. Ceux-là comme les autres s’animaient contre lui par des vociférations haineuses. C’était un brigand, un assassin, un empoisonneur, un de ces maudits parpaillots dont avait parlé le curé de Saint-Christophe, auxquels il fallait courir sus comme à des chiens enragés !

Et les meneurs de cette bande renchérissaient sur les injures, les calomnies, les accusations perfides, et attisaient encore la colère des paysans ameutés contre la maison du Désert.