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qu’il s’éloignait, elle faisait de petites capitulations de conscience : « Après tout, cet argent donné par son père, c’était le sien… Ce testament était un crime contre la famille… Et puis, à tout hasard, elle se confesserait de la chose… à l’article de la mort… D’ici là, elle avait le temps… »

Chemin faisant, Daniel lui, réfléchissait à sa situation. Il ne doutait point que Zélie, ayant supprimé le testament de son père, ne fût décidée à promptement recueillir le bénéfice de cet acte criminel. Et comment la payerait-il ? D’argent comptant, il n’en possédait guère. Il y avait bien sur pied la coupe du bois des Goubeaux, pour laquelle il était en pourparlers avec un marchand de bois. Mais le prix de cette coupe, il le destinait à l’amortissement partiel de l’obligation consentie au défunt M. de Légé, dont le remboursement arrivait bientôt à échéance. Ce prix d’ailleurs étant loin de couvrir la somme due, il était résolu à céder le fonds lui-même pour se délivrer d’une dette qui lui pesait.

Mais l’autre dette, celle envers Zélie, pressante aussi, comment l’éteindre ? Le docteur était d’autant plus embarrassé qu’il ne pouvait ni ne voulait demander à ses créanciers ni sursis ni renouvellement, qui, du reste, il le sentait, lui eussent été refusés.

En arrivant au Désert, Daniel rencontra dans l’allée de marronniers Sylvia qui promenait son enfançon, avec la petite Noémi accrochée à sa jupe. Il en oublia, un moment, ses divers soucis. Après les deux petits il embrassa la mère, si tendrement qu’elle le regarda en souriant de manière interrogative.

Et lui de répondre à cette question muette :

— C’est que, plus je vois de femmes, plus je t’aime !