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outre, dix-huit mille francs sur la quotité disponible.

Vingt-cinq mille francs à distraire de son patrimoine ! Zélie en fut suffoquée. Pendant quelques jours, elle réfléchit à ce legs motivé par l’affection toute paternelle du testateur pour Daniel. Sur un point elle n’hésitait pas : elle était résolue à supprimer le testament. Mais ses préoccupations cupides ne lui faisaient pas oublier absolument le caractère de l’acte qu’elle allait commettre. Elle ne le redoutait pas comme crime justiciable des hommes, mais comme péché. La peur du diable la tenait, la damnation éternelle l’épouvantait. En cette perplexité, l’idée d’un mariage lui vint. Cela arrangeait tout : plus d’acte coupable ; les vingt-cinq mille francs resteraient dans la maison, et elle aurait un mari par-dessus le marché, un mari qui ne lui déplaisait point, et à qui elle avait parfois songé dans les rares instants son avarice laissait parler son cœur de pucelle endurcie.

À la suite de ses réflexions, elle manda un jour au docteur qu’elle avait quelque chose à lui dire.

Lui se doutait bien qu’il s’agissait des sommes payées pour lui par le défunt notaire. Il n’y avait jamais pensé beaucoup, son vieil ami lui ayant dit plusieurs fois de ne s’en pas inquiéter. Quatre jours avant sa mort, M. Cherrier lui avait même montré le testament qui était dans sa poche et lui en avait confié les dispositions :

— Vois-tu, mon ami, comme disaient nos anciens dans le préambule de leur testament, s’il n’est rien de plus certain que la mort, il n’y a rien de plus incertain que l’heure d’icelle : c’est pourquoi j’ai fait mon testament, que samedi prochain je déposerai ès mains du confrère Boutet.