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grand ébahissement de sa mère et des deux hommes, à qui Trigant venait d’affirmer sa présence au Désert.

Mais, peu de temps après, tous trois prirent leur revanche. Appelée traîtreusement au dehors par le berger, Sylvia trouva sa mère qui l’embrassa, l’amitonna fort, et renouvela ses sollicitations, protestant que c’était pour son bonheur qu’elle la voulait « loger » en ce château. Tout en discourant ainsi, la Cadette mena sa fille jusqu’au bout de l’allée. À ce moment, les gendarmes, embusqués dans un bois voisin, arrivèrent au galop, et, par une savante manœuvre, coupèrent la retraite à Sylvia, qui ne témoigna aucun étonnement. Interrogée si elle voulait suivre sa mère comme le portait l’ordre du procureur, elle prit une résolution soudaine et répondit que oui : « Puisque sa mère la voulait placer chez la dame de Légé, elle était prête à y aller sur le coup et à y rester si la dame l’engageait. »

Sur cette réponse, la Cadette, ravie de sa docilité, s’achemina vers le château avec elle, toutes deux suivies à dix pas par les gendarmes, qui les quittèrent après les avoir vues entrer dans la cour.

Avertie par Séverine, Minna reçut les deux femmes, et, après quelques brèves questions à Sylvia sur son âge, son savoir-faire, lui demanda :

— Où êtes-vous, présentement !

— Au Désert.

— Alors, c’est vous la servante-maîtresse du médecin Charbonnière ?

— Oui, madame. Il est le père de mon enfant.

Sylvia espérait que cet aveu la ferait refuser catégoriquement par madame de Bretout. Mais il vint à celle-ci une idée diabolique ; « Ah ! le bon tour à jouer au cousin en lui enlevant sa maîtresse !… »