Page:Eugène Le Roy - L’Ennemi de la mort.djvu/236

Cette page a été validée par deux contributeurs.

« Qu’ils fassent comme ils voudront ! » se dit-il en reprenant les rênes.

Un pâle soleil d’hiver montait alors péniblement au-dessus de l’horizon, et ses rayons sans chaleur et sans force glissaient à peine entre les nuages qui barraient le ciel de raies grisâtres. Un jour blafard s’épandait lentement sur la Double engourdie par le froid hivernal, et, au lieu des joyeuses chansons d’oiseaux qui saluent au printemps le lever de l’astre, Daniel n’entendait que le croassement d’une bande de corbeaux au déjucher.

En voyant à distance fumer la cheminée du toit familial, le docteur réjoui se confirma dans son indifférence au sujet des sentiments que témoignerait la famille de Légé.

Il ne resta pas longtemps, d’ailleurs, dans l’incertitude à cet égard.

Quatre ou cinq jours plus tard, comme il se chauffait en compagnie de M. Cherrier — qui venait tâter d’un cuissot de sanglier envoyé par M. de Fersac, — arriva le cousin de Légé. Ce n’était plus l’homme éperdu qui suppliait Daniel de le suivre : le danger de sa fille passé, il avait repris sa froideur correcte. Après des remerciements mesurés pour le secours efficace donné à madame de Bretout, M. de Légé aborda la question délicate des honoraires : que devait-il à Daniel ?

À ces mots celui-ci répondit qu’il s’était rendu près de sa cousine par devoir général d’humanité aussi bien que par honnête scrupule de voisinage et de parenté ; qu’il était fort heureux d’avoir apporté un renfort décisif à son confrère ; mais que, n’ayant pas eu l’intention d’intervenir comme médecin professionnel, mais seulement à titre officieux, il considérait cette