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et nippes avec l’aide de son futur mari qui avait amené un petit charreton attelé d’un âne. Peu après survint M. Cherrier, aux fins de dresser un état des lieux, et l’inventaire du cheptel et des objets remis au nouvel exploitant du moulin. Le cheptel vif se composait en tout de la vieille bourrique évaluée quinze francs et de onze brebis côtées vingt sous par tête. Il y avait aussi au moulin une mauvaise chèvre écornée que la Cadette revendiquait pour sienne, comme ayant été achetée de ses deniers, ce à quoi contredisait fort le preneur qui la voulait avoir. Enfin, après de longs et fastidieux chipotages entre les parties, la Cadette resta en possession de la chèvre, moyennant la promesse faite par Daniel au successeur de lui donner la première biquette qui naîtrait au Désert.

Quand tout fut achevé, le docteur, par manière d’information, s’enquit à la Cadette de plusieurs choses concernant Sylvia… Était-elle née à Chantors ?

— Que non, notre monsieur : elle est née dans la paroisse de Beauronne, l’année d’avant que nous vinssions au moulin.

Et elle raconta comment la chose était advenue.

— Le jour de Notre-Dame de septembre, j’étais allée dans les bois chercher des champignons sans me donner garde que j’étais près de mon terme. À un moment, je fus prise par les douleurs : alors je m’assis au pied d’un arbre et me délivrai de la petite, que je rapportai chez nous dans mon tablier…

— Et ce nom Sylvia, que vous autres ne connaissiez sûrement pas, qui le lui a donné ?

— C’est votre défunt père. Mon homme l’étant allé querir, il vint et trouva cette drôlette qui avait bonne envie de vivre. Lorsque je lui eus raconté com-