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sa réussite, fut très gai. Quant au docteur, il était ravi de démontrer par les faits, la vertu de la vaccination.

— Voyez-vous, disait-il, quand ceux des autres communes de la Double verront qu’il n’y a plus de varioleux à Saint-Michel, ils se décideront à se faire vacciner.

— N’y comptez pas trop, monsieur Charbonnière ! s’écria le curé. Ne fût-ce que par négligence, beaucoup s’abstiendront. Il faut contraindre les paysans, pour leur faire du bien.

— C’est la vérité même que tu dis là, Médéric ! remarqua M. de Fersac.

Le souper fini, le curé s’excusa et quitta la table.

— Il est gentil, votre curé, dit le docteur, après que celui-ci eut disparu.

— N’est-ce pas ? C’est un franc et honnête garçon, droit et généreux… C’est dommage qu’il soit prêtre et obligé de porter toute sa vie un masque sur la figure !… Il est vrai qu’il l’ôte quelquefois… Sans lui je m’ennuierais souvent, dans ce trou. Il me tient compagnie à table et à la chasse ; nos goûts se ressemblent fort et nos manières…

— Si je ne craignais d’être indiscret j’ajouterais : « Et vos personnes physiques. »

— Ajoutez, ajoutez, docteur !… Il y a, voyez-vous, de bonnes raisons pour cela, reprit M. de Fersac après une pause.

Mon père eut jadis, voici quelque trente ans, une légère distraction avec une jolie fille d’un de nos métayers, d’où naquit un petit garçon. Ma mère, qui était une bonne et sainte femme, fit élever cet enfant du péché, à ses frais, et, plus tard, dans une pensée d’expiation, elle en fit un prêtre. En sorte que le