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— Tu ne prendras que ce que je te permettrai.

— Je ferai tout ce que tu me diras, maître répondait la petite en le regardant, reconnaissante.

Tous les jours, Jannic, chargé d’un panier et réjoui de la commission, apportait à Chantors des œufs, du bouillon, du lait, des aliments légers, car l’incurie de la mère à tous égards rendait ces envois nécessaires. Grâce à toutes ces précautions, la convalescence fut normale, et Sylvia put enfin se lever. Elle était bien faible encore, et passait ses journées dans un vieux fauteuil envoyé du Désert.

Alors, libre de ce côté, Daniel put retourner à ses projets philanthropiques. Son premier soin après la guérison de Sylvia fut de faire un arrangement avec Fréjou. En présence du curé de la Jemaye, le rusé compère s’engagea à dessécher son étang et à le mettre en prairie, moyennant une indemnité de trente francs payée par le docteur. En outre, celui-ci devait traiter gratuitement des fièvres Fréjou et sa famille, et même fournir les remèdes.

Ces conditions exorbitantes indignaient le brave Daniel qui avait un vif sentiment de la justice et de l’équité ; mais il les accepta néanmoins.

— Il faut que j’aie bien besoin de faire une démonstration qui leur crève les yeux, à tous ! dit-il au curé en se retirant.

Cette affaire conclue, le docteur se remit à courir le pays, et notamment à visiter, chaque dimanche, une des communes de la région. À la sortie de la messe, il voyait les gens, leur parlait en particulier, les prêchait longuement rassemblés en groupe, et répondait avec patience à leurs objections vingt fois ressassées, suivant l’usage des paysans. Il ne prétendait pas convaincre brusquement une population